déambulation urbaine             mai 2020 à Paris

 

imperceptiblement, nous avons adopté des modes d’évitement subtils
ce conditionnement acquis récemment rend notre allure un peu figée et nos démarches plus hésitantes et presque flottantes à certains moments, à la moindre présence humaine nous sommes en alerte

en quelques semaines seulement, une uniformisation discrète et efficace des comportements nous a dépossédé.e.s de notre démarche singulière avec notre liberté de mouvement

bien sûr le rythme de nos pas a changé aussi, il y a moins de hâte et moins d’allant aussi, on sent une précaution à être là et une attention particulière prêtée à ces précieux moments de liberté, sauf quand les personnes semblent abruti.e.s et se déplacent comme des zombies

les mouvements des piétons suivent des trajectoires étranges avec de légères déviations, comme par répulsion mutuelle, à l’approche d’une autre personne, au moment de la croiser ou de la doubler

les files d’attente créent des rubans surréalistes d’entités séparées repliées sur elles-mêmes et comme cloisonnées dans une (in)évitable méfiance

la distanciation balise et modère l’occupation de l’espace commun et rend la respiration naturelle des rencontres et des jeux (rapprochement-échange-éloignement) incertaine, voire improbable

quand plusieurs personnes se rencontrent, elles ont tendance à retenir leur souffle (pas idéal pour partager) et si d’aventure quelqu’un brise le cercle invisible de protection et s’approche trop près, elles ont facilement un geste de recul. Seuls les enfants débordent constamment du moule, du moins ceux qui sont trop jeunes pour avoir intégré la norme

comme s’ajoute à ces formes compassées le port assez systématique du masque, ils nous reste à chercher à croiser d’occasionnels regards pour trouver l’expression d’un visage et une personne vivante qui l’anime
mais plus que d’ordinaire les regards sont baissés par une sorte de retenue, comme si l’aliénation n’était pas suffisante

l’ensemble reste assez fluide et une certaine civilité est de mise, mais la chorégraphie ne convainc pas, elle ne résonne pas en nous !


comme le bal masqué va se prolonger un peu et l’uniformisation requise par la mise en scène aussi, nous devons nous rapprocher différemment, nous en avons envie et profondément besoin, évidemment, nous devons être solidaires les uns des autres et nous retrouver sensoriellement et émotionnellement

  • prendre soin de notre coeur et le nourrir
  • laisser naître nos mouvements, intentions et actions de notre coeur
  • permettre/inviter/oser nous exprimer véritablement avec le coeur
  • créer toute choses à partir de notre coeur

sont quelques directions à explorer
ils s’agit de notre liberté et notre droit souverains que rien ni personne ne peut limiter, réguler ou abroger

 

dans ce contexte, la télépathie prend tout son sens
tu t’es déjà familiarisé.e avec la technique, alors vas-y, adonne-toi à sa pratique

nous pouvons évidemment passer par-dessus toutes les limitations endurées en retrouvant des relations humaines tangibles et satisfaisantes au moyen du réseau invisible du coeur qui unit tous les êtres